evidence based practice

Dermatome et fasciatome


Stecco C. et al.  Dermatome and fasciatome. Clinical Anatomy 2019, 32(7):896-902.
Dermatome et fasciatome.
L'amélioration des connaissances sur l'innervation du fascia profond et sur organisation anatomique impose la réévaluation de la cartographie des dermatomes en fonction des nouvelles découvertes. Les auteurs distinguent dermatome et fasciatome, ils basent leur approche sur la littérature relative à la stimulation des racines nerveuses et la comparaison de la topographie des dermatomes et celle des myotomes. La première concerne la portion de tissu composée de la peau, de l'hypoderme et du fascia superficiel, innervée par toutes les branches cutanées originaires d´un même nerf rachidien. La deuxième concerne la portion du fascia profond innervée par la même racine nerveuse et organisée selon des lignes de force correspondant aux principales directions de mouvement. Le dermatome est important pour l'extéroception, tandis que le fasciatome est important pour la proprioception. S'ils sont altérés, le dermatome engendre une douleur clairement localisée et le fasciatome irradie la douleur en fonction de l'organisation de l'anatomie fasciale.

Innervation des fascias

Des recherches récentes montrent que le fascia profond est richement innervé (Stecco et al. 2007, Taguchi et al. 2013, Tesarz et al. 2011) et qu’il pourrait jouer un rôle dans la proprioception et dans la perception de la douleur. Les fibres nerveuses du fascia profond peuvent être soit peptidergiques, soit non peptidergiques. Taguchi et al. (2013) ont montré que les terminaisons nerveuses libres sont à la fois de type Aδ et C. Les fibres Aδ semblent être principalement sensibles aux stimuli mécaniques tels que le clampage, tandis que la plupart des fibres de type C sont polymodales (nocicepteurs) et donc sensibles à la fois aux stimuli mécaniques et chimiques (par exemple, à la bradykinine) ainsi qu' à la chaleur. En outre, les fibres C du fascia profond ont un seuil d'activation mécanique très élevé (1.854 mN), soit environ deux fois celui de la peau ou du muscle.
Schilder et al. (2014) ont constaté que la stimulation du fascia thoracolombal avec une solution saline hypertonique chez des volontaires sains pouvait générer une douleur, plus intense et plus irradiante que celle provoquée par l'injection de la même solution dans la masse musculaire des muscles érecteurs du rachis. Des résultats similaires ont été obtenus par Deising et al. (2012) avec des injections de facteur de croissance nerveuse dans le fascia thoracolombal. Schilder et al. (2018) ont conclu que la stimulation électrique de divers tissus mous de la région lombale révèle des caractéristiques différentes de la douleur en fonction de son origine : musculaire, fasciale ou cutanée, le caractère profond de la douleur indique que le muscle est le tissu concerné. La douleur brûlante ou la douleur vive caractérise un problème fascial.
Schilder et al. (2018) ont également souligné que les lombalgies d'origine fasciale ou cutanée peuvent conduire à une interprétation erronée et être considérées comme neuropathiques.
Ils ont aussi observé une sensibilisation à long terme des nocicepteurs du fascia profond à la pression mécanique et à la stimulation chimique avec des acides. Ce mécanisme pourrait expliquer les douleurs musculo-squelettiques chroniques. Les mêmes auteurs ont montré que les terminaisons nerveuses libres du fascia sont stimulées plus efficacement lorsque le fascia est "pré-étiré" par une contraction musculaire. La stimulation électrique du fascia profond produit une douleur sourde et gênante, tandis que la même stimulation de l'hypoderme et du fascia superficiel produit une douleur aiguë et clairement localisée (Itoh et al. 2004).
Cela suggère que les deux types de fascia jouent des rôles différents : le fascia profond semble avoir une fonction principalement proprioceptive, tandis que le fascia superficiel semble coopérer avec la peau pour l'extéroception. La couche adipeuse intercalée entre les fascias (TAP = tissu adipeux profond) joue probablement un rôle d'isolation, permettant aux deux fascias de se mouvoir et d'être étirés indépendamment.
Les auteurs pensent que le TAP devrait être considéré comme la "ligne de partage des eaux" entre le système extéroceptif (formé de la peau, du tissu adipeux superficiel et des fascias superficiels) et le système proprioceptif (situé dans les muscles et les fascias profonds).  Le tissu adipeux profond disparaît et où les fascias superficiel et profond fusionnent (comme dans la paume de la main et dans la plante pied), les systèmes exteroceptif et proprioceptif sont combinés. Cela facilite la perception de la forme, du volume, des surfaces des différents objets et, par conséquent, permet le mouvement, garantissant l'adaptation du pied et de la main aux différentes surfaces de contact. Les variations anatomiques existent et, de manière prévisible, les cartographies des dermatomes diffèrent entre les individus...


Dermatome - fasciatome - innervation - tissu adipeux profond